Les médias face à leur destin

Extrait

> "Paradoxe : les moyens techniques et intellectuels nécessaires pour produire et diffuser une information de qualité abondent ; mais, à de rares exceptions près, la presse imprimée et numérique chancelle, incapable de juguler la dégradation de ses contenus et de stabiliser son assise économique."

Et si l'avenir passait par la fin des impôts sur les titres de presse et la fin de la pub!

Article de Nil Sanyas, journaliste citoyen québécois. 

« On a l’impression que les sources sont de plus en plus nombreuses. L’information est partout continue, elle nous fracasse. Mais, en réalité, elle est de moins en moins diverse et plurielle », observe avec raison Frédéric Bonnaud, des Inrockuptibles...si on se limite à la presse "traditionnelle". C'est beaucoup moins vrai si on prend en compte le "journalisme citoyen" qui se développe sur le web. Mais alors, se pose un autre problème - qui ne concerne pas tous les blogs heureusement - le souci de la déontologie journalistique et le respect du contradictoire. Le journalisme d'opinion a aussi ses effets pervers.

A première vue, la PQR (presse quotidienne régionale) semble avoir raflé la mise avec 6 projets sur 23 soutenus par le fonds Google d'aide à l'innovation numérique dans la presse. Mais Laurent Dupin a raison de faire observer que "ceux qui pèsent le plus touchent le moins". Et pour cause, la PQR a reçu en moyenne 750.000 euros par projet, là où la PQN a reçu 975.000 euros par dossier, alors même que les titres de PQR éligibles à cette aide pesaient en diffusion 2013 quelques 1,61 millions d’exemplaires papiers, quand ceux de la PQN (gonflée du Parisien) pesaient 1,16 millions d’exemplaires.

Loin de moi l'idée de faire de l'anti parisianisme primaire, mais bon!

Un titre choc, c'est un bon moyen d'interpeller les lecteurs. Non, le Monde Diplo n'a pas cessé de paraître. Mais en 2013, il a bel et bien disparu de la liste des deux cents titres les plus aidés, rendue publique le 5 mai par le ministère de la culture et de la communication.

Après un coup de gueule l'an dernier, le Diplo a choisi la dérision, cette année, pour critiquer le mode d'attribution des aides à la presse... et pour lancer un appel aux dons par la même occasion.

La Commission européenne a accepté jeudi l'octroi d'aides publiques à l'Agence France-Presse pour "des missions d'intérêt général".

"Le rôle de l'Etat n'est pas d'abandonner la presse. Si on abandonnait les subventions (...) alors que la presse est en difficulté, cela poserait un vrai problème démocratique", a relevé M. Montebourg, interrogé sur la distribution des journaux qui est l'une des missions de service public de La Poste.

Le Monde diplomatique s'étonne avec raison de la répartition des aides à la presse, lui qui se classe au 178e rang des journaux aidés par l'Etat, loin derrière Le Nouvel Observateur (8e), L’Express (9e), Télé 7 jours (10e), Paris Match (12e), Valeurs Actuelles (66e) mais aussi Télécâble Satellite Hebdo (27e), Grazia (74e), Point de Vue (86e), Closer (91e), Le Journal de Mickey (93e), Gala (95e), Voici (113e), Prions en église (121e), Auto Moto (124e), Mieux vivre votre argent (129e), Détente Jardin (167e) ou encore Spirou (172e).

Qui participe le plus au débat démocratique, avec quelle quantité de pub dans ses pages? Bref, Le Monde diplo en est réduit à renouveler son appel aux dons auprès de ses lecteurs.

Faites tourner.

Le  site de référence en matière d’informations européennes va cesser sa publication le 20  décembre. La faute à la Commission européenne qui, le 12 juillet, a retiré son appel d'offre concernant la diffusion d'une revue de presse europénne. Ajouté à ça un plan de licenciements initié par le groupe Le Monde et qui touche la rédaction de Courrier International, dont fait partie Presseurop. L'issue était forcément fatale.

Une pétition de soutien a été mise en ligne par les journalistes  de Presseurop.

Cette affaire repose plus largement la question des aides à une presse de qualité au niveau européen.

A la baisse de la pub et de la diffusion pourrait s'ajouter un nouveau coup dur pour la presse en 2014: la fin de la compensation des hausses des tarifs postaux préférentiels par l'Etat. Les coûts postaux pourraient ainsi augmenter de 15% à 22%, à partir du 1er janvier. Les syndicats de la PQR et de la PQR demandent à l'Etat de faire marche arrière sur cette mesure. 

La remise des conclusions du premier volet de la mission sur l'avenir du schéma de la diffusion de la presse écrite interviendra en décembre. Les recommandations portant sur le moyen terme sont attendues avant la fin du 1er semestre 2014. 

Le contexte (cf post précédent avec Denis Robert) : la disparition annoncée de la presse papier et la multiplication des plans de licenciement.

Philippe Couve résume dans Médiacadémie les points les plus importants de la nouvelle loi sur la presse, loi qui propose un modèle juridique, inspiré de l’économie sociale et solidaire.

- La création d’un nouveau statut «d’entreprise solidaire de presse d’information».

- La régulation renforcée de la distribution de la presse au numéro. 

- La réforme de la gouvernance de l’AFP.

- L’élargissement des lieux où s’applique le droit de visite aux fins d’investigation.

Tous les détails dans l'article, avec le constat et un commentaire sur la solution juridique choisie pour les 4 points.

Le Monde diplomatique a disparu du tableau des 200 titres les plus aidés selon les chiffres 2013 publiés en avril 2014.

Explication des critères d'attribution par Serge Halimi.

Extrait

Les médias suisses ne pourront pas faire face aux bouleversements de l'ère numérique sans aide. Forte de ce constat, la Commission fédérale des médias préconise un soutien financier tourné vers l'innovation et propose de créer une fondation ad hoc, indépendante de l'Etat.

 Le fonds Google d'aide à l'innovation numérique dans la presse vient de faire 23 heureux. Pour les résultats, il faut encore attendre un peu. 

Aiguillonné par Acrimed, Le Point renonce aux aides à la presse pour mettre sa politique en conformité avec sa ligne éditoriale. Un coup marketing tenable à long terme? A voir. D'autant que la lettre est signée Henri Maler, directeur fictif et provisoire du Point. 

Sacré Acrimed ;-)

Le contexte: "L'année 2013 aura été bien noire pour la presse française, nationale, régionale ou magazine: chute des ventes et des recettes publicitaires, déficits généralisés, plans de départs, cessions en rafales, un déclin que les développements numériques et le soutien de l'Etat pour les accélérer ne compensent pas."

Etat des lieux dans La Tribune... qui n'a pas abandonné le papier par hasard.

Plus intéressantes encore que les aides en volume, les aides rapportées aux numéros vendus. Le journal le plus aidé par l'Etat en proportion de sa diffusion est l'hebdomadaire Le Nouvel Economiste, qui perçoit 81 centimes d'euro par exemplaire diffusé, pour un prix de vente de 2 euros. Onzième journal le plus aidé par l'Etat, le quotidien L'Humanité est, lui, subventionné à auteur de 53 centimes par numéro, soit plus du tiers de son prix de vente (1,40 euro).

Cet article de Cyrille Frank dans Mediaculture m'avait échappé. Merci Martin. 

Edwy Plenel l'a rappelé lors des Assises du journalisme qui ont été organisées à Metz : le bon journalisme ne peut être gratuit, car il coûte cher à produire.

Seulement voilà, faire du bon journalisme (comprenez du journalisme d'investigation façon Mediapart ou du journalisme long du type de celui que fait la revue XXI) ne suffit pas nous explique en substance Cyrille Frank, alias Cyceron, dans Mediaculture. Il relève trois défauts majeurs du système médiatique: un problème de distribution autant que d'offre, et une aide publique mal répartie. 

L'analyse est pertinente... et malheureusement inquiétante.

Le plus de cet article : Cyceron est fidèle à sa marque personnelle en prolongeant le débat avec sa communauté dans son courrier des lecteurs. Il répond à chacun. Et propose aussi plusieurs liens avec ses archives pour qui veut prolonger la réflexion.  

L'amendement a peu de chance d'être adopté.